« Deep Fakes : Art and Its Double » interroge sur la capacité des copies numériques de trésors artistiques universels à provoquer, chez les publics, une réaction émotionnelle. Ces « deepfakes » se différencient de ceux utilisés à des fins de manipulation et de désinformation, pour ouvrir des perspectives différentes sur les objets en s’appuyant sur des technologies de pointe…
« Les deepfakes culturels sont riches de sens. Ils offrent, grâce à la technologie, un aperçu analytique de dimensions invisibles en favorisant l’émergence d’hypothèses et de connexions imprévues », explique la commissaire de l’exposition, Sarah Kenderdine, directrice des Pavillons de l’EPFL.
Un concentré d’innovations technologiques dédiées à la visualisation
De l’intelligence artificielle à la vision par ordinateur, des médias interactifs et immersifs à l’impression 3D et 5D, la technologie révolutionne la façon dont l’art est conçu, créé et vécu, et « Deep Fakes » est la première exposition à envisager cette transformation technologique à l’échelle.
Outre les vingt-et-une œuvres d’art high-tech et les expériences virtuelles présentées, les visiteurs de cette exposition avant-gardiste suisse sont notamment aux premières loges pour assister à une première technologique : la combinaison du système Satellite MLS de Digital Projection avec la technologie de projection 3D Multi-View pour aider à reconstruire l’abbaye de Michaelsberg, une église bénédictine de mille ans, classée au patrimoine mondial de l’Unesco, et située sur le site de Bamberg, en Allemagne.
Une matérialité numérique des objets qui explore de nouvelles formes
« Deep Fakes », qui se déploie sur 1 000 m², est « l’aboutissement de plusieurs années de pratiques créatives issues du monde de l’informatique », explique la commissaire de l’exposition. Ces nouveaux artéfacts, qui empruntent ou s’appuient sur des œuvres d’art existantes, ont pour l’occasion été baptisés « deep fakes culturels ».
« Ce n’est que récemment que les artistes et les producteurs ont commencé à saisir pleinement le potentiel de la production informatique et des nouvelles formes d’art », souligne Sarah Kenderdine, professeure de muséologie qui a plus de vingt ans d’expérience dans le développement et la production d’expositions immersives et interactives à grande échelle pour des musées, ainsi que pour des sites du patrimoine mondial en Asie, comme Angkor au Cambodge et, en Europe, l’Olympie en Grèce.
Parmi les « deep fakes culturels » exposés aux Pavillons de l’EPFL, situés sur le campus de l’École on trouve « The Next Rembrandt », qui utilise l’intelligence artificielle pour créer une « nouvelle » œuvre du maître néerlandais, qui a vécu et est mort au XVIIe siècle ; The Golden Calf, de l’artiste médiatique phare Jeffrey Shaw, qui ne se révèle que lorsque le visiteur a tourné autour de son piédestal dans une « danse d’adoration » ; et Abbey Saint Michel, Bamberg, une reconstruction numérique complète de l’intérieur du monastère vieux de mille ans.
Découvrir des trésors patrimoniaux en groupe grâce au dispositif Multi-View de Digital Projection
L’abbaye physique de Michaelsberg est fermée pour des rénovations depuis 2012, date à laquelle des dommages structurels ont été découverts. Dans le cadre du processus de restauration, le spécialiste du balayage laser 3D ArcTron a été chargé par la ville de Bamberg de créer une recréation photoréaliste haute résolution de l’intérieur de l’église, qui contient d’importantes œuvres d’art, de sculpture et d’architecture de la fin de la Renaissance et du Rococo.
Pour l’exposition « Deep Fakes », le groupe de recherche sur la réalité virtuelle et la visualisation de l’université Bauhaus de Weimar et l’entreprise dérivée Consensive ont développé des techniques de rendu en temps réel pour les modèles 3D d’ArcTron, permettant de les présenter dans une réalité immersive à l’aide de Multi-View, technologie de projection 3D multi-utilisateurs de Digital Projection qui n’a pas d’équivalent sur le marché.
Le système de Digital Projection à Lausanne, qui a également été installé par l’Université Bauhaus, comprend un projecteur Insight Satellite MLS 4K HFR 360, ainsi que six paires de lunettes fabriquées par Volfoni. Grâce à la fréquence d’images ultra-rapides (360 images par seconde) propres à Multi-View, ce projecteur unique est capable de fournir une véritable expérience 3D à plusieurs spectateurs, chacun d’entre eux ayant une vue de l’exposition qui reste adaptée à sa position. Cela permet aux utilisateurs de se voir et d’interagir les uns avec les autres d’une manière véritablement collaborative et partagée.
« Au lieu de fournir 120 images par seconde, ce qui n’est suffisant que pour la 3D mono-utilisateur, l’Insight Satellite MLS 4K HFR 360 fournit un nombre inégalé de 360 images », s’enthousiasme Sarah Kenderdine, qui affirme que cette technologie est tout simplement révolutionnaire pour les experts du patrimoine, dans la mesure où elle peut offrir à tous ceux qui regardent une œuvre d’art numérique une expérience partagée. « Le fait de donner à chaque utilisateur un point de vue unique sur un objet nous offre des possibilités de collaboration inédites », s’enthousiasme-t-elle.
Dans sa spécification Satellite MLS (Modular Laser System), l’Insight Satellite MLS 4K HFR 360 offre aux professionnels des musées une solution encore plus convaincante pour les expositions multimédias modernes, explique Thierry Ollivier, responsable du développement commercial Europe pour Digital Projection et superviseur du déploiement pour « Deep Fakes ». Avec le Satellite MLS, la tête du projecteur, petite et légère, est dissociée de la source lumineuse, ce qui permet une projection 4K lumineuse avec un faible encombrement et une production minimale de bruit/chaleur à proximité des éléments de l’exposition. Cette conception unique rend Satellite MLS idéal pour toutes les applications où la chaleur et l’espace sont limités (théâtres, opéras, les bâtiments historiques…).
Une approche immersive appelée à se développer
Des technologies telles que Multi-View et Satellite MLS joueront un rôle de plus en plus important dans les futures expositions d’art et de musées, où l’audiovisuel contribuera à plonger les visiteurs dans des expériences toujours plus interactives, estime Sarah Kenderdine.
« Au niveau du musée, ces outils offrent de nouvelles façons de raconter des histoires : des histoires qui ne sont pas nécessairement didactiques, des histoires qui émergent et répondent à l’interaction des utilisateurs, et des histoires que les visiteurs peuvent incarner et habiter. L’audiovisuel ouvre les archives et leur fournit tellement plus de potentiel de réutilisation. Cela donne aux artistes, aux créateurs et aux conservateurs une nouvelle toile pour créer des cadres esthétiques que nous n’avons jamais vus auparavant, et des modalités d’engagement qui transportent et ravissent les visiteurs. »
Quant à la solution de Digital Projection en particulier, les Pavillons de l’EPFL ne pouvaient pas être plus ravis du résultat : « L’unité a parfaitement fonctionné, avec l’assistance à distance de Digital Projection, elle était opérationnelle en une demi-journée. Les personnes du public l’ont également adorée. Ils reconnaissent la différence : cela ne ressemble à rien de ce qu’ils ont vu auparavant. Et les scientifiques de l’EPFL sont également venus à plusieurs reprises visiter l’exposition, pour voir les nouvelles possibilités offertes par les technologies », souligne la commissaire de l’exposition.
« Travaillant avec la professeure Kenderdine depuis dix ans sur des projets de projection et de réalité virtuelle, je salue son talent et ses efforts pour combler le fossé entre la technologie et l’art », conclut Thierry Ollivier. « “Deep Fakes” combine l’expertise de Digital Projection, Consensive et Volfoni. Ces technologies et expertises de pointe, mises au service de Sarah et son équipe, proposent à un large public, des autorités culturelles de renommée mondiale aux étudiants locaux, une expérience de réalité virtuelle totalement aboutie… Il faut le voir pour le croire ! »
« Deep Fakes : Art and Its Double » est conçue en deux parties.
- Dans le Pavillon B, la Partie I, constituée de dix-neuf installations, traite des thèmes du simulacre, des mondes miroirs, des doubles numériques, des cryptomonnaies et de l’intelligence artificielle.
- Dans le Pavillon A, la Partie II traite du patrimoine menacé, de sa mémoire archivistique et numérique et de sa reconstruction.
Article paru pour la première fois dans Sonovision #27, p. 80-82