Au fil des années, les équipements dédiés de traitement ou de diffusion des images vidéo se sont mués en micro-ordinateurs sur lesquels tournent des logiciels spécialisés. Et même lorsqu’ils conservent une électronique ou un hardware spécifique, le clavier dédié et l’affichage intégré disparaissent pour des raisons d’économie et sont remplacés par une interface web consultable depuis un PC en réseau. Un micro-ordinateur en boîtier indépendant (tour ou rack) est systématiquement accompagné de trois accessoires, le clavier, la souris et l’écran d’affichage, désignés en anglais par « keyboard », « video » et « mouse », d’où l’acronyme KVM.
Ces accessoires sont reliés de manière séparée via des câbles dédiés, VGA, HDMI ou DVI pour l’affichage, deux câbles PS/2 ou USB pour le clavier et la souris. Si l’utilisateur souhaite s’éloigner de l’unité centrale pour des raisons de confort ou d’implantation de son poste de travail, très vite, il sera bloqué par la longueur maximale de ses câblages, de l’ordre de quelques mètres.
Éloigner le poste de travail de l’UC
De nombreux constructeurs ont mis au point des systèmes de transport d’images informatiques sur câbles à paires torsadées de type réseau. Une paire de convertisseurs (« extenders » en anglais) transforme et amplifie le signal pour augmenter la distance entre la source d’images et l’écran d’affichage jusqu’à 70 ou 100 mètres.
Les systèmes KVM utilisent la même technologie pour la partie image à laquelle on ajoute des modulations pour transmettre dans le sens inverse les signaux du clavier et de la souris. Les câblages utilisés sont de type Cat5 ou 6 avec des connecteurs RJ-45. Leur similitude avec les câbles réseau ne doit pas laisser penser que ce sont des transmissions en mode IP. Il s’agit de modulation propriétaire en mode point à point. Le module récepteur avec sa sortie écran et ses ports souris/clavier doit être de la même marque que le module d’émission placé à côté de l’unité centrale à contrôler.
La consultation des catalogues de produits KVM est souvent déconcertante, car la multiplicité des connecteurs écran (VGA, HDMI, DVI, ou DisplayPort) et des claviers/souris (les antiques connecteurs PS/2, puis l’USB) ont poussé les fabricants à décliner leurs modèles d’extenders dans de nombreuses versions. Sans oublier le transport éventuel de l’audio en version analogique séparée ou « embeddée » dans le HDMI. Seuls les constructeurs spécialisés dans les outils KVM proposent l’ensemble des combinatoires.
Avant de choisir son système KVM, il est impératif de vérifier les résolutions d’écran transmises et la longueur maximale du déport. Les résolutions HD sont devenues courantes sur une distance de 100 mètres, mais parfois des produits bon marché restent en deçà de ces valeurs. Les produits haut de gamme acceptent l’UHD à 60 Hz. Toujours chez les spécialistes, sont proposées des versions multi-écrans (de 2 à 4 selon les modèles) pour contrôler à distance des postes informatiques avec des tâches réclamant un affichage ultra-large.
Du sélecteur KVM à la matrice
Lorsqu’un opérateur supervise ou contrôle plusieurs équipements informatiques et si cette surveillance n’est pas constante, on gagnera de la place en équipant son poste avec un seul écran/clavier/souris. Dans ce cas, le module de réception KVM sera remplacé par un sélecteur KVM dont chacune des entrées RJ-45 sera reliée à un module émission situé à proximité de chaque unité centrale supervisée.
Certains constructeurs, plus spécialisés dans le traitement des images informatiques, proposent aussi des sélecteurs KVM en version locale sans la partie transport sur paires torsadées. Dans ce cas, ils s’utilisent à proximité des unités centrales qui sont toutes regroupées au même endroit et fonctionnent comme des sélecteurs d’images informatiques.
Pour des architectures plus vastes avec un nombre conséquent de machines, il faut passer à une autre catégorie de systèmes KVM, les matrices KVM. Elles reprennent le principe des grilles de commutation vidéo/audio, mais appliqué aux signaux KVM. Si les extenders simples sont proposés par une multitude de constructeurs, les matrices KVM deviennent l’affaire de spécialistes et seuls quelques industriels se sont spécialisés sur ce créneau et proposent de multiples versions couvrant des capacités de 8 ports jusqu’à des systèmes imposants à 512 ports.
Des matrices compactes ou modulaires
Les matrices sont proposées en deux tailles : les modèles compacts jusqu’à 64 ou 80 ports, dans un châssis rack de 1 à 3 U, et des ensembles modulaires de capacité plus importante allant de 48 à 576 ports. Ces valeurs varient selon les marques et sont détaillées dans notre tableau. Les cartes enfichables d’entrées/sorties permettent de panacher les modes de câblage entre les câbles cuivre Cat5 ou Cat6 (pour une distance de l’ordre de 100 mètres) et la fibre optique (mono ou multimode jusqu’à 10 kilomètres). L’un des avantages d’un système KVM organisé autour d’une matrice est le doublement des distances entre UC et postes de travail, à condition de placer judicieusement les équipements.
Les secteurs intéressés par ces systèmes KVM de grosse capacité sont l’industrie lourde, le transport maritime à la fois à bord des bateaux et pour la gestion des ports, le contrôle aérien et la gestion des aéroports, la sécurité et les salles de gestion de crise et bien entendu le broadcast et l’audiovisuel.
Pour ces secteurs, les outils KVM sont surtout déployés dans les salles techniques des régies de diffusion, pour installer les opérateurs dans des régies confortables et leur éviter les nuisances des salles techniques (bruit, ventilation…). Ils aident aussi à répartir les postes de travail selon les fonctions à assurer et à passer facilement le contrôle des équipements d’un poste à l’autre selon les opérations à superviser ou la charge de travail.
Dans les régies de diffusion importantes, le couplage des matrices KVM avec les systèmes de pilotage ou de supervision de type VSM facilite cette réaffectation des postes selon les horaires ou les types de programme à gérer. Les matrices KVM sont aussi très utilisées dans les cars-régies, car elles simplifient l’accès aux serveurs ou autres unités centrales, depuis n’importe quelle cellule du car, ingé-vision, mixage vidéo ou son, ralentis.
Dernier secteur où l’usage des KVM se développe, celui de la postproduction. Ils donnent accès rapidement à une ressource supplémentaire selon le souhait du client, sans changer de salle de travail, ni y apporter une machine complémentaire.
Une dizaine de constructeurs sont présents sur le marché du KVM avec des systèmes aux capacités fort différentes. Compte tenu de la similitude de la technologie de transport des images, plusieurs spécialistes de la transmission des images informatiques proposent des produits KVM.
Ainsi Gefen (EAVS Groupe) possède à son catalogue plusieurs extenders KVM pour des liaisons point à point. Kramer fournit des sélecteurs KVM locaux jusqu’à 16 entrées DVI, mais sans transport des signaux à distance. Apantac (Distrimedia et Magic Hour) a également des produits à son catalogue. Opticis (Astone Technology), spécialiste du transport des signaux vidéo sur fibres optiques, propose des extenders point à point sur fibre optique pour des longues distances. Tous ces produits répondent aux besoins de liaison point à point et pour de petites installations aux capacités limitées.
D’autres constructeurs ont leur activité centrée principalement sur le KVM. Ainsi, Aten offre une large gamme de produits avec une variété d’extenders point à point, des sélecteurs KVM pouvant être cascadés pour constituer un système plus conséquent et des petites matrices 32 x 9 au maximum.
Avocent est un autre fournisseur de solutions KVM. La marque spécialisée sur ce marché a été rachetée en 2009 par Emerson Network Power, puis renommée Vertiv récemment. Les produits restent vendus sous leur marque initiale. Ils comprennent des extenders point à point et une matrice compacte à 32 ports.
Adder Technologies fabrique des systèmes KVM allant de systèmes point à point jusqu’à des matrices compactes d’une capacité de 30 ports. Ses systèmes communiquent sur paires torsadées ou fibre optique.
* Article paru pour la première fois dans Sonovision #6, p.50-54. Abonnez-vous à Sonovision pour accéder à nos articles dans leur totalité dès la sortie du magazine.
Pour lire la deuxième partie de cet article, cliquez ici