Parc scientifique implanté au cœur des volcans d’Auvergne, Vulcania n’avait encore jamais abordé le monde des abysses. C’est pourtant sur ces dorsales océaniques, situées à plus de 2 500 mètres de profondeur, que se concentrent les plus grands volcans actifs de la Terre. En gestation depuis un an, l’attraction Abyss Explorer, qui prend le suite de Magma Explorer 3, se devait donc de montrer, de manière aussi juste et divertissante que possible, cette intense activité volcanique et l’incroyable (et très peu connue) faune qui l’accompagne.
Scénographiée par Skertzò (Jean-Michel Quesnes et Hélène Richard), qui avait déjà signé pour le parc deux salles dédiées aux tremblements de terre et explorations de volcans, l’attraction sous-marine d’un budget de 1,8 million d’euros se compose d’une plongée très réaliste simulée dans les abysses, suivie d’une impressionnante « marche » au pied d’une falaise volcanique sous-marine. Comme il est désormais de mise dans les parcs, l’attraction a fait l’objet d’une scénographie suggestive afin de frapper l’imagination des visiteurs. Et ce, dès le preshow de l’attraction qui explique, via un film d’introduction de 2 minutes 30, la mission aux visiteurs de cette expérience inédite de tourisme extrême.
Plongée au fond des abysses
Annoncée comme « risquée », la plongée se fait à bord d’un bathyscaphe d’exploration où prennent place une trentaine de visiteurs qui se trouvent alors dans un décor de cale de bateau. Coscénographiée par Thierry Barbier et François Garnier (Amak), les réalisateurs de Magma Explorer 3, celle-ci s’accompagne de turbulences afin de pimenter la descente dans les profondeurs. Et ce, dès que le bathyscaphe est soulevé sans ménagement par une grue de la cale.
« Nous connaissions les potentiels de cette plate-forme dynamique construite par Bosch Rexroth pour l’avoir déjà expérimentée dans Magma Explorer 3. Nous savions donc comment mettre en scène le film dès son animatique 3D », précise Thierry Barbier. Reprogrammée néanmoins de fond en comble avec l’aide de l’ingénieur belge Xavier Wielemans (Tiny Big Story) qui a développé des outils de pilotage sous Unity, la plate-forme s’est enrichie de nouveaux mouvements comme des rotations à 360°, des secousses diverses…
La descente et son florilège d’événements l’accompagnant (« pillows lava » qui éclatent à la surface de l’eau, etc.) a fait l’objet d’un film panoramique (de 3 minutes) en images de synthèse 3D réalisé par François Garnier, qui signe également le film du preshow. Les membres de l’expédition découvrent ce film à travers douze hublots, constitués par des toiles de rétroprojection, devant lesquels ont été placées des lentilles de Fresnel : une astuce scénographique qui rend plus crédible cette immersion dans l’eau en venant perturber la vision et déformer cachalots, méduses ou autres créatures aquatiques venant s’y coller. « Nous avons configuré l’animation en 3D réalisée par Picto Filmo en fonction de ce cadrage particulier et de la position en partie haute des hublots. »
En charge de l’installation audiovisuelle pour l’ensemble de l’attraction, la société Axians a installé derrière ces « écrans » six vidéoprojecteurs Christie 5 400 lumens DWX555 laser (alimentés par six lecteurs vidéo Brightsign), et interfacé la plate-forme mobile avec le système d’automation Médialon V6 Pro. Celui-ci lance également la diffusion du film et le design sonore en 4.1 signé par Franck Schmidt, constitué de bruits de moteur, des voix synthétiques de l’ordinateur de bord…
Projection au fond de la faille
À peine arrivés au pied de l’île volcanique, les visiteurs, surpris par une éruption, doivent se poser sur une base de secours. Lorsqu’ils sortent enfin du bathyscaphe, ils se retrouvent dans un nouveau décor aménagé, cette fois-ci, dans une immense salle de Vulcania creusée à même la roche volcanique (utilisée déjà pour l’attraction précédente). Sur plus de trente mètres de découverte (sur huit mètres de haut), ce ne sont que « fumeurs noirs », panaches d’eau et laves rouges qui semblent jaillir d’une faille béante et se mêler aux fantasmagoriques créatures des grands fonds océaniques.
Pour ces huit minutes de spectacle intégral imaginé et réalisé par Skertzò, l’immersion se fait, cette fois-ci, dans l’image : les visiteurs doivent se tenir aux garde-corps de passerelles pour ne pas perdre l’équilibre, se trouvant très près de la surface de projection, qui n’est autre que la paroi rocheuse. Réalisé à partir de documents validés par des vulcanologues sous-marins, ce spectaculaire mapping vidéo brasse, pour l’essentiel, de nombreuses reconstitutions 3D (Cinéma 4D, Maya).
« Pour restituer l’émotion d’une expérience vécue, le vrai et le faux sont étroitement intriqués, précise Hélène Richard. L’impression que l’on se trouve au fond de l’eau n’est pas apportée uniquement par l’image, mais aussi par de réelles nappes de brouillard comme celles produites par les fumeurs noirs. Nous avons passé beaucoup de temps à caler ce vidéomapping, qui suit les anfractuosités de la roche, avec les effets de fumée (les brillances, etc.) : le support est en effet très sombre et la matière de la roche terrestre ne ressemble pas à celle de la roche maritime. Notre travail, en fait, se rapproche plus du spectacle vivant que du film. »
Hormis la plate-forme dynamique employée pour la plongée, peu de dispositif – et aucun matériel audiovisuel – de l’attraction précédente a été réutilisé. « Repartir sur de l’existant n’a pas facilité l’implantation, remarque néanmoins Hélène Richard. L’emplacement du matériel de projection (etc.) était fortement contraint par la configuration de la salle, mais nous devions faire en sorte que les machines soient toujours accessibles pour l’exploitant et demeurent invisibles pour le visiteur. »
Immersion dans l’image oblige, la projection des abysses recourt à quatre vidéoprojecteurs Digital Projection Highlite laser 10 k lumens. Installés à l’horizontale et à la verticale, ceux-ci sont alimentés par un serveur Modulo Player 4 flux qui assure le softedge final des images. L’ensemble est piloté par le Médialon V6 Pro, qui contrôle aussi en DMX les machineries à fumée mises en place par Crystal Group, l’installation audio assurée par Agora Audio ainsi que le show lumière conçu par Stéphanie Daniel. Sous la supervision de Daniel Saulnier (Axians), l’attraction sous-marine a demandé deux mois et demi d’installation et de calage sur place.
* Cet article est paru en intégralité, pour la première fois, dans Sonovision #3, pp 18-19. Abonnez-vous à Sonovision pour recevoir, dès leur sortie, nos articles dans leur totalité.