Spécialiste du transfert de connaissances pour l’industrie et l’éducation via les technologies de visualisation avancées, Eon Reality est, en 18 ans, devenue leader mondial sur le territoire des applications de réalité virtuelle et augmentée.
La société, dont le siège est basé à Irvine, en Californie, a démarré son activité en développant des systèmes d’immersion de type CAVE (Cave Automatic Virtual Environment). Aujourd’hui, elle se déploie autour de 22 filiales internationales et propose notamment une bibliothèque de ressources de réalité augmentée/réalité virtuelle qui intègre 7 000 applications consacrées au transfert de connaissances. Plus de 36 millions de personnes dans le monde ont déjà eu l’occasion de télécharger une ou plusieurs de ses applications via l’Ap Store ou Google Play.
Eon s’est implantée en France, à Laval, en 2014. C’est là que notre histoire commence… Le site, qui se consacre à la R&D et à la production, regroupe actuellement 60 collaborateurs. La maturité des technologies numériques, et tout particulièrement des applications en mobilité sur tablettes et smartphones, lui profite puisqu’il y a deux ans l’équipe ne comptait que huit personnes ! Parmi ses clients, on peut citer, entre autres, Colas, Orange, Axa ou encore la SNCF.
« La transformation numérique de l’école est un chantier majeur qui implique les acteurs publics et privés autour d’un même projet : la réussite des élèves. Cet objectif est en résonance avec notre cœur de métier, nous avons donc soumis une proposition au corps enseignant », explique Yann Froger, directeur d’Eon France.
Ainsi, dans le cadre d’un partenariat avec l’Académie de Nantes, Eon France a développé des supports pédagogiques en réalité augmentée et réalité virtuelle qui sont actuellement exploités en tant que séquences pédagogiques tests à destination d’élèves de cycles 3 et 4. Plus de 500 élèves, du CM1 à la 3e, sont concernés par ce projet pilote qui a commencé le 6 février et se déroule jusqu’au 30 juin dans plusieurs établissements scolaires des départements de Mayenne et de Sarthe.
L’initiative, inédite par son ampleur, sa durée et le nombre de matières enseignées, permettra de déterminer si les technologies de réalité virtuelle et de réalité augmentée peuvent s’intégrer au quotidien des enseignants de l’Éducation nationale et si leur impact sur l’apprentissage des élèves est significatif.
Le projet en détail
Fin février, Eon Reality et l’école élémentaire Eugène Hairy, à Laval, avaient invité les journalistes à découvrir comment une classe de CM1/CM2 utilise deux outils pédagogiques de réalité virtuelle et augmentée dans le cadre d’un cours sur la sécurité routière préparant les élèves à l’attestation de première éducation à la route. La classe était divisée en sous-groupes de travail et une partie de ces sous-groupes se voyait confier un exercice à réaliser en s’appuyant sur une expérience pédagogique en réalité augmentée ou sur une séquence d’animation VR/360. Dans les deux cas, l’instituteur avait choisi de faire travailler ses élèves sur une tablette numérique en binôme.
L’expérience pédagogique s’inscrit dans un programme d’expérimentation qui compte au total dix sujets traités en mode réalité virtuelle ou augmentée. Toutes ces séquences ont été développées en concertation avec des référents, enseignants de l’Éducation nationale, qui ont guidé les équipes d’Eon Reality dans l’élaboration des contenus. Les sujets retenus concernent notamment l’histoire (la vie dans les tranchées pendant la Grande Guerre, les événements précurseurs de la Révolution) et les SVT (le système digestif humain, les volcans).
Ces leçons mobilisant des technologies immersives représentent un appui à l’enseignement à la manière d’un livre et n’ont vocation à être utilisées qu’avec l’accompagnement et les explications de l’enseignant qui choisit de les exploiter à sa convenance…
« L’outil offre l’avantage de permettre aux élèves d’avancer à leur rythme, tout en me laissant une grande disponibilité pour répondre aux besoins spécifiques de chacun d’entre eux », explique l’enseignant qui nous accueille. « Par ailleurs, j’ai noté que ces séquences immersives facilitent les apprentissages complexes au travers du découpage de situation », souligne-t-il.
Un travail de conception en équipe
Pour l’élaboration des contenus, les référents pédagogiques et les équipes d’Eon Reality ont dialogué avec une grande volonté d’éditorialisation de part et d’autre, et certaines matières ont été développées avec une perspective « ludique » afin de favoriser l’entrée des enfants dans l’activité.
Les contenus ont tous été produits par le site Eon de Laval, dont l’unité de production se répartit sur deux pôles : un pôle d’infographistes et un pôle de programmation. Pour ce travail, mais aussi pour faire face à une demande exponentielle, Eon a recruté, pour son département graphique, vingt-trois collaborateurs en contrat d’apprentissage et une personne en Fongecif.
Pour rester dans une perspective de coût maîtrisé, Eon a fait le choix d’un style d’images low poly, c’est-à-dire façonnées avec le moins de polygones possibles (donc éloignées de l’hyperréalisme)… « En général les enfants apprécient ce style, cela tombe bien ! Pour ce projet, l’équipe de graphistes a développé une dizaine de chartes. Les plus complexes d’entre elles ont nécessité 500 heures de travail réparties entre quatre graphistes », explique Thierry Frey, directeur de projet.
La société, qui utilise les outils standard du marché pour la conception graphique, a, pour l’application elle-même, exploité un moteur de rendu propriétaire. Celui-ci permet de porter les contenus sur tous les terminaux AR/VR du marché, y compris l’hololens.
Un déploiement raisonné
Thierry Frey précise : « Généralement, le coût moyen d’un contenu 3D varie de 5 000 à 50 000 euros, en fonction du degré d’interactivité et de son déploiement. Dans le cas présent, Eon souhaite proposer à l’Éducation nationale un service qui ne devrait pas coûter plus de 2 euros par mois par élève, hébergement de l’application dans le cloud compris.
Il est effectivement conseillé de charger cette application dans le cloud ; elle peut fonctionner sous forme logicielle en local, sans connexion Internet, mais lorsqu’elle est utilisée en mode SaaS, elle offre l’avantage de pouvoir recueillir les données de progression de l’utilisateur en temps réel. »
Deux étudiants en master, encadrés par deux maîtres de conférence du CREN (Centre de recherche en éducation de Nantes), ainsi qu’une étudiante en master de l’ESPE (École supérieure du professorat et de l’éducation), ont suivi l’expérimentation. Si les résultats sont concluants, l’expérience pourrait se généraliser.
* Article paru pour la première fois dans Sonovision #7, p. 58-59. Abonnez-vous au magazine Sonovision (1 an • 4 numéros + 1 hors-série) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.